
Jean Dugenêt
Essayiste politique
FRANCE
Sa biographie
Nombreux sont ceux qui me pressent de questions : dis-nous au moins ce que tu penses, donne-nous quelques mots clefs, des étiquettes : es-tu révolutionnaire ? extrémiste ? de droite ? de gauche ?
Je ne peux pas répondre avec des mots qui pour moi n’ont aucun sens. « Révolutionnaire » : en voilà un1…
mot galvaudé ! Même de Gaulle se prétendait révolutionnaire. « En France, il n'y a qu'un seul révolutionnaire, c'est moi ! » se plaisait-il à dire. Et Pétain aussi se disait révolutionnaire en prônant la « Révolution Nationale ». J’ai même entendu un petit bourgeois s’esclaffer « Mais, c’est révolutionnaire » devant une soupière portant l’inscription « poubelle de table ». Je suis au moins autant révolutionnaire que la « poubelle de table ». Quant aux expressions « gauche », « droite », il est de plus en plus évident que, si elles avaient un sens pendant la révolution de 1789-93, elles ne veulent plus rien dire. Mais alors es-tu pour ou contre la révolution ? Nous n’avançons pas plus. Il ne sert à rien d’être pour ou contre les révolutions. Celles-ci s’imposent épisodiquement sur la scène de l’histoire qu’elles aient ou non été souhaitées. Les révolutions sont des actes de démocratie qui surviennent quand des tyrans détestés par le peuple s’accrochent au pouvoir et que les masses populaires doivent les pousser pour les contraindre à partir. Les révolutions ne sont pas l’œuvre des révolutionnaires mais celle des peuples.
Ce sont d’ailleurs beaucoup plus souvent les révolutions que les élections qui font évoluer le monde. Si nous nous promenons dans le temps ou dans l’espace, nous voyons beaucoup de changements importants advenir dans bien des pays. Ces changements ne sont jamais le fait d’une élection. Actuellement, on peut raisonnablement estimer qu’il y a en France un risque de révolution. Dans l’état de putréfaction dans lequel nos institutions se trouvent, il est clair que la perspective n’est plus de rafistoler l’Etat. Chacun perçoit qu’il faut des changements de grandes ampleurs. Ce n’est pas sans raison que les gilets jaunes scandent souvent « Révolution ! Révolution ! » La population, dans sa grande masse, rejette le système actuel. Il faut donc se préparer pour, en cas de soulèvement révolutionnaire, faire face à d’énormes risques. Quand une révolution survient, les nantis ne veulent jamais abandonner leurs privilèges et il y a un risque de contre-révolution ou de guerre civile. Il faut le plus possible éviter cela. Les contre-révolutions aboutissent généralement à d’atroces mesures de répression de la part des revanchards et les guerres civiles peuvent faire beaucoup de morts. Il faut aussi se demander qui va exercer le pouvoir quand les privilégiés qui s’y accrochaient vont être chassés ? Le peuple risque de se voir confisquer le pouvoir qui devrait lui revenir. La plupart du temps c’est la force constituée la plus organisée qui se trouve projetée au pouvoir. Il en fut ainsi dans bien des cas. A Cuba, des castristes qui voulaient maintenir le capitalisme se sont finalement emparer du pouvoir et, sous la pression populaire, sont allés plus loin qu'ils ne le voulaient dans les réformes sociales pour, finalement, s'aligner sur la politique du Kremlin. En Iran c’est un pouvoir religieux qui s’est mis en place. Il y a aussi un risque de dégénérescence comme ce fut le cas en Russie. Pour se préparer, il me paraît indispensable de regrouper une avant-garde. Celle-ci devra être en mesure d’impulser, si besoin, les bonnes décisions pour faire basculer le pouvoir, au bon moment, après une situation de double pouvoir. Pour cela cette avant-garde doit regrouper les éléments les plus conscients, ceux qui se prononcent pour le RIC, le Frexit, le Front Unique Ouvrier lors des élections, le soutien inconditionnel aux victimes en cas d’atteinte aux libertés démocratiques…
Alors, où sont ces militants les plus conscients qui constitueront l’avant-garde ? Je ne le sais pas. Je suis seulement certain qu’il faut les regrouper. Il faudra à la tête de l’avant-garde des hommes d’une trempe exceptionnelle. Je pense en particulier à quelques leaders des gilets jaunes qui ont eu assez de cran pour ne céder à aucune pression. L’avant-garde devra venir pour l’essentiel de la jeunesse. Partout les jeunes sont aux premières places du combat contre une société qui ne leur promet qu’un sombre avenir. Il n’est que de voir les manifestations qui, à l’instar des gilets jaunes, secouent actuellement de nombreux pays. Il faudra probablement, par la discussion, les aider à assimiler le bilan de l’histoire du mouvement ouvrier. En cela, les retraités expérimentés de ma génération pourront être utiles pour passer le flambeau. Il faudra peut-être aussi leur administrer « une bonne inoculation de marxisme » comme disait Trotsky, de manière imagée, à propos d’un personnage d’un roman d’André Malraux.
Ah ! Voilà ! Le nom de Trotsky est lâché. Alors : êtes-vous trotskyste ? Avant de répondre à cette question, il faut se souvenir que, pendant une longue période, les militants qui restaient fidèles aux idées de la révolution d’octobre 1917 mais critiquaient le régime de Staline étaient tous qualifiés de trotskystes par les staliniens et qu’ils étaient à ce titre pourchassés et exterminés partout où Staline pouvait le faire notamment dans toute l’URSS. En ce sens, je prends pour un compliment qu’on me qualifie de trotskyste car assurément je suis de leur côté mais je ne suis pas certain pour autant d’être trotskyste. En particulier, je ne suis membre d’aucune organisation internationale. J’ai sans doute d’ailleurs une petite dose de libertaire anarchiste. Vous le voyez : j’ai beaucoup de doutes. Mais, soyez assuré que j’ai aussi quelques certitudes. Je suis absolument certain que ceux qui ne se battent pas pour le Frexit ne sont pas trotskystes. Je suis absolument certain que ceux qui ont couvert le mouvement des gilets jaunes d’insultes et de calomnies ne sont pas trotskystes. Ceux qui n’ont pas compris que la stratégie du soutien inconditionnel est indispensable pour défendre les libertés démocratiques ne sont pas trotskystes. Les gauchistes et les sectaires qui veulent paraître purs et durs en refusant de défendre des "personnalités compromises", en rejetant tous les syndicats, en "boycottant" toutes les élections, n’ont en fait nullement l’intention de passer sur l’autre rive. Ceux-là non plus ne sont pas trotskystes. Ce sont des révolutionnaires de la phrase dont l’attitude a été stigmatisée par Trotsky lui-même dans le programme de transition :
« Ils piétinent sur place, se contentant de répéter les mêmes abstractions vides. Les événements politiques sont pour eux une occasion de faire des commentaires, mais non d'agir. (…) Dans la politique pratique, les sectaires s'unissent à chaque pas aux opportunistes, surtout aux centristes, pour lutter contre le marxisme. »
De fait, les sectaires qui me critiquent appellent le plus souvent à voter pour des adversaires du Frexit (FI, NPA ou LO, quand ce n'est pas, ni plus ni moins, Chirac ou Macron). En fin de compte, je conclus qu'il n'y a plus de trotskystes en France.
Pour finir de me présenter, il me reste à préciser qu'ayant fréquenté, pour mon grand malheur, les universitaires j’ai appris à leur contact à user de ce qu’ils appellent le « nous de modestie ». J’ai eu du mal à m’y mettre mais j’ai finalement été contaminé et j’en ai gardé l’habitude. J'essaie maintenant de me défaire de ce nous qui est aussi un "nous de majesté". C'est tout dire ! Le « nous » que j’emploie maintenant n’exprime plus seulement mon point de vue. Il exprime aussi celui des militants qui me suivent.
Année 2019, Jean Dugenêt
Vous pouvez maintenant me coller des étiquettes : trotskyste et, par conséquent, marxiste, léniniste, bolchévique… Elles adhèrent bel et bien. Je disais encore l’année dernière, à propos des trotskystes : « assurément je suis de leur côté mais je ne suis pas certain pour autant d’être trotskyste. En particulier, je ne suis membre d’aucune organisation internationale. »
Je suis maintenant militant de l’AGIMO (Avant-Garde Internationaliste du Mouvement Ouvrier) organisation proclamée l’année dernière.
J’en étais à constater que des organisations françaises qui se réclament du trotskysme n’avaient assurément rien de commun avec la politique élaborée par Trotsky pour mener à bien la révolution socialiste. En poursuivant cette réflexion, j’en suis venu à considérer que « Il n’y a plus de trotskystes en France ». J’ai écrit, sous ce titre, plusieurs versions d’un article. J’ai ensuite étudié l’histoire des organisations qui se réclament du trotskysme ce qui m’a amené à considérer que seules celles qui assument l’héritage de Nahuel Moreno sont effectivement trotskystes. Il y en a trois et, avec l’AGIMO nous avons pris contact avec les trois et nous examinons où se situent les divergences entre-elles. Après le décès de Nahuel Moreno, la LIT-QI (Ligue Internationale Trotskiste – Quatrième Internationale) qu’il avait créée s’est en effet scindée en plusieurs organisations. Nous estimons, pour l’instant, que les divergences entre ces organisations ne sont pas programmatiques et qu’elles ne justifient donc pas l’existence de plusieurs internationales. Nous œuvrons donc pour leur réunification. Nous estimons être ainsi engagés dans le combat pour la reconstruction de la IVème internationale. C’est pourquoi je me considère dorénavant, en tant que militant de l’AGIMO, comme un trotskyste.
Année 2021, Jean Dugenêt
Contact : jeandugenet@gmail.com
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