Par La Sellette
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Pendant deux jours, le prévenu a participé à un trafic de cocaïne. Il a 19 ans, un casier vierge et habite chez sa mère. Le juge amuse la salle à ses dépens avant de l’envoyer pour 8 mois en prison.
De nombreuses personnes atteintes de troubles mentaux sont envoyées en prison après avoir été jugées en comparution immédiate. À travers deux récits d’audience, on revient sur cette question, qui croise la notion problématique de « dangerosité », la présence – ou non – d’expertise psychiatrique dans le dossier et l’illusion des magistrat⋅es que la prison peut être un lieu de soin.
Le juge s'indigne : « Qu’est-ce qu’on fait avec les gens comme vous ? »
« — C’est vous qui êtes payé pour trouver une solution ! Moi, je vais pas me dégonfler parce que vous voulez m’envoyer en prison. »
La juge reproche amèrement aux prévenus d'avoir vendu de la drogue « alors que les offres d’emploi pour l’été sont innombrables » :
— Quand on pense que des restaurateurs sont obligés de fermer l’après-midi parce qu’ils ne trouvent pas de saisonniers !
Le prévenu a dû interrompre son traitement psychiatrique en prison et n’a pas pu le reprendre après. Peu importe, la juge enchaîne : « Vous savez que vous avez des problèmes graves et vous ne vous soignez pas ! C'est de la dangerosité sociale, ça, monsieur. »
Le prévenu comparaît pour trafic de stupéfiants. Le procureur ne comprend pas pourquoi il a préféré vendre de la drogue plutôt que de faire un crédit à la consommation.
Aurélie Garand parle de la mort de son frère, Angelo, abattu en mars 2017 par le GIGN, et du combat qui a suivi pour obtenir la vérité et la justice. Elle raconte comment la violence judiciaire a suivi la violence des forces de l’ordre.
La procureure résume : « Son parcours est chaotique. Il a seulement un CAP. Dix jours après être sorti de détention, il a déjà renoué avec son passé délinquant. Même si on décèle qu’il ne veut pas retourner en prison, il ne l’a pas vraiment conscientisé. »
Même si le prévenu comparaît aussi pour avoir menacé sa compagne, le procureur s’émeut surtout du fait qu’il ait outragé un gendarme : « On ne peut pas dire qu’on soit dans un pays où les forces de l'ordre ne font pas leur métier convenablement. »