Professeure agrégée honoraire, Docteure de l'Université de Rouen, Qualifiée aux fonctions de maître de conférences, Chercheure en sciences humaines indépendante, poète à ses heures
DIEPPE - France
Le Printemps, tout sourire, vagabondait sur les chemins de terre, foulant les mille fleurs des talus, gambadant sur les sentes des bois clairs, folâtrant dans les prairies hersées, traversant les champs emblavés, enjambant les ruisseaux babillards que chez nous on appelle « becs » depuis l’âge scandinave, pataugeant dans les gués, dansant dans le vent frais de mars en fredonnant ses ritournelles.
Entre nous deux, tu as érigé un mur de silence, inexpugnable mur de l’Atlantique hérissé de dangers, cruel mur de Berlin des temps soviétiques aveuglant la liberté, monumentale muraille de Chine infranchissable par les hordes cavalières accourues du Nord pour réduire à merci l’Empire du Milieu en péril.
Nous nagions dans la fraîcheur des vagues sous le soleil brûlant, moins rayonnant que nos visages éblouis par les pleins feux de l’été, la danse des eaux salées, l’amour fou et le bonheur partagé. Nous avions trente ans et la splendeur de chaque jour nous était promesse d’éternité.
Aux confins du monde et de la vie, entre rêve et néant, seuls mes pas froissent encore le silence. Nul ne sait pour combien de temps. Se souviendront-ils de mon bref passage en ces lieux, les grands arbres du jardin que tu avais plantés ?
Au soleil de ton amour, je vais, si seule, si transitoire, par les chemins bleus de chez moi, visitant mes lointains souvenirs et semant à la ronde, fleurs échappées des bouquets d’hier, des pensées passagères écloses pour toi par milliers.
Je visitais le monde. Je voulais voir toutes les merveilles, respirer tous les parfums, comprendre toutes les tragédies. Le temps pressait, il restait si peu de pages au livre de ma vie.