Avec la disparition de Johnny Hallyday, on vient définitivement d’enterrer la France des Trente glorieuses, celle de la DS voiture (de luxe) présidentielle, de Léon Zitrone, de Guy Lux et Simone Garnier, de l'époque bénie où le Tour de France était encore remporté par des coureurs français.
L’histoire du mouvement socialiste français retiendra que l’exclusion de Gérard Filoche fut le moment symbolique où la nature de classe du PS bascula définitivement : de parti du salariat à une formation bourgeoise d’appoint du macronisme dominant. Le nouveau Parti radical est probablement né à cette occasion.
En lisant les dernières lettres qu'Antonio Gramsci a adressées à sa famille, on perçoit à quel point le dirigeant communiste se sent seul et désespéré. Et pourtant, jusqu’à sa mort, il a rédigé ces cahiers politiques d’une écriture microscopique et soignée ; une écriture paisible.
Dans le paysage désolé de la gauche européenne, la gauche portugaise relève la tête. Le PS, au pouvoir depuis deux ans, vient de remporter largement l’élection municipale. Le PCP perd quelques villes mais tient son rang. Le Bloco de Esquerda, dirigé par Catarina Martins, une jeune et dynamique porte-parole nationale, est en hausse et engrange des succès prometteurs.
Jeremy Corbyn a mené une campagne d’homme de gauche. C’est le dirigeant du plus grand parti social-démocrate d’Europe. Il a constamment rappelé dans ses discours la centralité de l’opposition Labour vs. Tories, qui correspond au Royaume-Uni au clivage gauche vs. droite en France. Il a évoqué le socialisme et ses valeurs éternelles d’égalité, de pluralisme et de tolérance.
La gauche de gauche sera rejetée par “les gens”, si elle renvoie dos-à-dos la démocratie bourgeoise et un régime autoritaire. La défense des libertés fondamentales est, pour la gauche, un des grands acquis du combat antitotalitaire au 20e siècle. Mis à mal ces derniers jours, il convient de le préserver contre les tentations autoritaires de droite, mais aussi de gauche.
La balle est dans le camp de Jean-Luc Mélenchon : veut-il vraiment faire gagner la gauche ou préfère-t-il camper jusqu'au bout le personnage du “sauveur de la France” ? Veut-il que l’on se souvienne qu’il aura permis de sauver la gauche d’une défaite historique ou que son ego aura épousé jusqu’à la caricature les habits plébiscitaires de la 5e république ?
Il est vain d’espérer la naissance d’une gauche de gauche sur les ruines fumantes de la social-démocratie. Cette dernière possède toujours un électorat et des adhérents qui sont de gauche et qu’il faut convaincre. C’est donc le travail unitaire, et non les injonctions sectaires, qui est la clé d’une recomposition radicale de la gauche française.
La victoire de Benoît Hamon met la gauche de transformation sociale devant ses responsabilités : veut-elle continuer dans la surrenchère sectaire qui la cloisonne dans le créneau des 10 à 15% des voix, ou bâtir un axe majoritaire comme l’a fait Syriza ou comme le tentent avec un certain succès Bloco de Esquerda au Portugal ou Podemos en Espagne ?
Une lecture ambivalente de la tragédie d'Alep a pris corps dans des cercles de la gauche « radicale ». Celle-ci efface des débats les combattants pour une Syrie libre et démocratique qui s’opposent à la fois à la dictature d’El-Assad et à Daech. Ce discours impérialiste français, qui s'oppose à l'impérialisme étatsunien, renie plus d’un siècle de traditions et de luttes internationalistes.