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Le temps s’échappe inexorablement dans un dernier souffle de vie interminable. Emportée dans un monde fantasmagorique et ténébreux, le corps ballotté par les éléments, une jeune femme s’abandonne à l’obscurité qui envahit son âme, son sang. En s’intéressant au modus operandi du suicide, la performeuse Phia Ménard captive et surprend par la radicalité de son propos qui s’étire un peu trop à l’envi.
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Le temps s’étire à l’envi entraînant dans une mortifère, lente et cynique sarabande les êtres esseulés et mélancoliques de Tchekhov. S’emparant d’une courte nouvelle du dramaturge russe, Anatoli Vassiliev interroge la vacuité de l’existence, le mal de vivre des femmes éprises de liberté, la torpeur des hommes dominants et se perd dans un travail expérimental qui semble toujours en cours.
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D’inquiétantes silhouettes envahissent un espace scénique plongé dans la pénombre. Errant sur des monceaux de détritus, ces âmes noires tourbillonnent tels des vautours autour de l’argent et de la mort. Adaptant avec une minutie cette pièce sombre de Koltès, Philippe Barronnet signe un spectacle d’ambiance radical, sans espoir dont l’esthétisme ténébreux avale la cruelle dramaturgie.
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Un vent léger souffle sur la scène du Déjazet et fait frémir les cœurs. Dans un décor bucolique juste suggéré, les amours, les passions vont bon train bien que corsetées dans les convenances d’une société de classes. Avec une infinie délicatesse Alain Françon cisèle la comédie de mœurs de Tourgueniev et offre un écrin tragique et enchanté au couple Anouk Grinberg – Micha Lescot. Epoustouflant.
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Des corps s’attirent, se repoussent, se déchirent. Des âmes errantes cherchent en vain un but à leur existence en perdition dans des eaux sombres. En s’intéressant à l’épopée homérique, Christiane Jatahy interroge l’altérité homme-femme, prend faits et causes pour les migrants et signe une performance scénique dont les tableaux poétiques n’effacent pas la vacuité textuelle du propos. Étrange !
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Dans une chambre où s’entrecroisent rêves, cauchemars et réalité, Ariane Mnouchkine convoque le monde, ses déshérences, ses incongruités, ses violences et ses abominations. Mêlant avec virtuosité et fantaisie les genres et les cultures, Le théâtre du Soleil, sa troupe créée en 1964, elle invite à une balade fantasmagorique, une tragi-comédie intense, totale entre barbarie et burlesque.
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Errant dans les majestueux et décatis décors de l’Opéra Macbetto de Verdi, créé en 2016, les âmes mortes de la plus courte tragédie de Shakespeare hantent les lieux, dansent dans une folle farandole orchestrée joliment par Frédéric Bélier-Garcia. Si l’on peut regretter que l’ensemble manque de corps, on se laisse emporter par la choralité des scènes et la présence lumineuse de Dominique Valadié.
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Larmes et sang se mêlent sur le sol palestinien. Les amours y sont contrariées par une raison froide, des convictions sans nuances. Les femmes sacrifiées corps et âmes. Retraçant sur 40 ans l’histoire du conflit israélo-palestinien, Adel Hakim, décédé cet été, signe une pièce-fleuve familiale, tragique et burlesque qui interroge et crée le malaise forçant parfois le trait de la caricature.
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Gestes déliés, jambes tendues, corps graciles, musculeux, les danseurs d’Alonzo King envahissent l’espace et donnent vie aux chants envoûtants, jazzy de Lisa Fischer. Solos hypnotisants, pas de deux ciselés, danses de groupe animales, les chorégraphies du californien, ancien élève d’Alvin Ailley, s’accordent avec ingéniosité aux vocalises de la cantatrice et en soulignent leur singulière beauté.
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Entre deux spectacles, Trahisons de Pinter au Lucernaire et L’abattage rituel de Gorge Mastromas de Denis Kelly, le souriant et charismatique Yannick Laurent a pris le temps de boire un café en notre compagnie pour revenir sur le rôle-titre de cette fable noire mise en scène par Franck Berthier qu’il joue actuellement quatre soirs par semaine au studio Hébertot. Rencontre.