Admettons même que l’école et, avec elle, la République aient un temps bien joué ce rôle. Pourquoi ne le jouent-elles plus aujourd’hui ? Que représente cette République ? Et pour qui l’école est-elle faite ? Le pauvre, l’étranger, le fils de sans-papiers, la fille d’immigré, le Noir, le Beur ont-ils vraiment à l’école les mêmes chances que les autres ? L’école est-elle vraiment pour eux un tremplin vers une vie meilleure ?
Les revendications identitaires des orphelins de la République se font tout naturellement entendre jusqu’entre les murs de l’école. Elles brouillent les pistes de cette école imaginée comme un sanctuaire intouchable. Elles en forcent les portes, parfois à mauvais escient, mais elles sont là. Si la République ne peut pas y rester longtemps sourde, l’école non plus. Celle-ci a bel et bien le devoir de se mettre au diapason d’une France en perpétuel changement et d’un monde en constante évolution.
L’universel des jeunes générations sera de plus en plus polymorphe, polychrome, polyphonique, en un mot : pluriculturel. Comment faire pour que l’école intègre ces données à temps et prépare la nation démocratique de demain, laïque et non laïciste, énergique et ouverte, prête à accueillir en son sein ses « oubliés » et ses « mal aimés » ? Aux nouveaux « hussards » de la République incombe cette tâche difficile. Et il convient de les accompagner.
Les textes, documents et réflexions portés par cette édition participative reflètent et prolongent les travaux des deux journées de l’édition 2008 du Pari(s) du Vivre-Ensemble, qui se sont déroulées les 19 mars et 2 avril, à l’Unesco et en Sorbonne. Associant les efforts d’enseignants du secondaire, de chercheurs, d’élèves, d’éducateurs, de responsables et militants associatifs, syndicaux ou politiques, ces textes tâchent de frayer de nouvelles voies, tout en scrutant et en discutant celles qui existent déjà. Pour regarder ensemble un peu plus loin.
Esther Benbassa