« Être du bond. N’être pas du festin, son épilogue » (René Char)Il est des moments où se pose la question de la pertinence d'écrire pour témoigner d’une expérience. Pour des raisons pratiques – le spectacle à l’origine de cette expérience a été créé il y a longtemps, nombre d’articles ont déjà été écrits dessus, il est à l’affiche depuis déjà dix jours et pour seulement une semaine encore… mais aussi pour des raisons intimes, parce que ce spectacle a fait remuer en vous, radicalement, la somme de sensations et de connaissances liées à tous les spectacles de danse vus auparavant.
Roman épistolaire, fable à deux fois deux mains, boîte de Pandore de la littérature… ce livre, au titre à géométrie sémantique variable, semble avoir été écrit par une multitude d’auteurs : de masque en masque, d’imposture littéraire en superposition des genres, on ne sait plus à quel littérateur se vouer et l’on finit par s’en remettre au fantôme de Pierre Ménard.
Faut-il considérer la réécriture du mythe comme un genre à part entière ? À moins que l’on ne considère que le mythe est à l’origine de toute écriture, que la structure des mythes imprègne toute tentative littéraire – et pas seulement narrative…
À la marge d’une tradition du pèlerinage littéraire, épousant les mises en abyme chères à Roberto Bolaño auquel elle rend discrètement hommage, Hedwige Jeanmart propose dans son premier roman Blanès (Gallimard, 2014), une déambulation entre fiction et histoire littéraire.
J’avais croisé David Géry dans une nuit en plein jour, un cube de bois noir où les heures s’inversent, le lieu du théâtre. C’était à l’occasion de sa remarquable adaptation du Fahrenheit 451 de Ray Bradbury au théâtre de la Commune d’Aubervilliers (début 2013), où il avait convoqué les « acteurs du livre », selon la formule consacrée, à prendre celle-ci au pied de la lettre et à incarner les hommes et les femmes-livres de la forêt.
Au commencement, à l’enfance de l’art, les mains se joignent, tournent l’une sur l’autre, s’agitent et le mur se remplit d’histoires, de bêtes, de cris, d’abstractions fantastiques. Quand les doigts se dénouent du chien vers l’oiseau, du tigre vers le coq, elles sont pour quelques instants privées de sens, morceaux de chair d’où la vie d’avoir trop jailli s’éteint d’un coup.