"Les hommes constituent, de par le monde, entre 90 % et 100 % des criminels, des pédophiles, des violeurs, des chefs d' Etat et des grands leaders religieux".Je lis et relis cette phrase de Nancy Huston. Elle ne nous apprend rien que nous ne sachions déjà. Et pourtant elle nous apprend tout, ou du moins elle nous apprend beaucoup. Il a suffi qu'elle opère publiquement un rapprochement tabou, qu'elle juxtapose "violeurs" et "leaders religieux" par exemple.Bien entendu cette formule interroge frontalement tous ceux qui s'efforcent vraiment de comprendre les clivages de genres.Mais elle a une portée beaucoup plus générale sur la pensée et la non-pensée politique: cette façon de souligner l'évidence de ce qui n'était su qu'obscurément, inconsciemment, d'extraire de l'ombre, de révéler quelque chose d'essentiel simplement en réglant différemment le zoom ou en changeant l'angle de vue, exige bien sûr un affranchissement du prêt-à-penser managérial et des substituts-de-pensée technocratiques dont sont bouffis les croyants à Sciences-Po et à l' Ena, qu'ils en soient sortis diplômés (comme la plupart de nos dirigeants ou postulants aux sommets de l' Etat) ou qu'ils aient vainement essayé de l'être et se soient contentés d'être entourés de conseillers, experts et consultants issus du même moule, comme notre président pour qui concept rime manifestement avec market ou gadget, et "politique de civilisation" avec lampion.Il y a là, me semble-t-il, comme un exemple par excellence du type de "décalage" culturel
Un juge manquant tout à la fois d’humilité et d’expérience, vraisemblablement un peu plus« suffisant insuffisant » que ne le sont les détenteurs d’autorité ordinaires, soucieux commebeaucoup d’entre eux – avec peut-être un petit peu plus de vanité, un petit peu moins descrupules - de satisfaire les attentes de ceux dont dépendent son avenir social, son « rang ».