Lors d’une discussion avec une collègue d’une disciplinaire littéraire qui préparait un enseignement sur l’intelligence artificielle, celle-ci m’a dit que ce qui lui semblait singulier dans l’intelligence artificielle est qu’il s’agit d’un objet humainement construit, et dont pourtant on ne sait expliquer pourquoi il obtient tel ou tel résultat. Cela m’a donné à penser.
Traiter les questions physiques telles que le réchauffement climatique avec les outils intellectuels adaptés aux questions d’opinion ou de technologie conduit à une impasse épistémologique et politique.
Le traitement médiatique tend à transformer des questions de faits, susceptibles d’argumentation rationnelle ou scientifique, en questions d’opinions politiques. C’est, à mon sens, dangereux pour la démocratie.
Dans les réactions au verdict dans l’affaire des emplois fictifs du RN au Parlement européen, on voit revenir l’idée que ce ne serait pas aux juges d’écarter une personnalité des responsabilités politiques, mais aux électeurs. Regardons un peu ce que nous faisons dans d’autres domaines où la justice intervient pour faire cesser un trouble et éviter la récidive.
Poursuivons, si vous le voulez bien, sur le sujet Wikipédia. Une petite réflexion sur la couverture médiatique des questions de qualité dans les encyclopédies.
On m’a encore interpellé sur la question des biographies sur Wikipédia, et notamment de la place à accorder à la parole du sujet de la biographie. Faut-il que la personne évoquée dans la biographie ait le dernier mot ?
Les récents propos polémiques du Point envers l’encyclopédie en ligne Wikipédia reprennent des antiennes connues : en raison de l’absence de contrôle centralisé et du pseudonymat des participants, Wikipédia publierait des faussetés, ou du moins des articles biaisés ; il conviendrait de la réformer. Je voudrais ici élargir un peu le débat.
Depuis des années, des médias, mais aussi parfois des universitaires, importent en France la rhétorique de la droite américaine, celle des trumpistes triomphants. J’estime que, si certains pouvaient plaider la bonne foi, au point où nous en sommes, il s’agit au minimum de naïveté politique, au pire d’alliance objective.
Pourquoi Wikipédia était-elle présentée en 2005 comme un danger pour la jeunesse et l’enseignement, tandis que, 20 ans plus tard, on présente les « intelligences artificielles » génératives comme le futur de l’enseignement ? Mon avis : car la première est portée par des structures à but non lucratif, et les secondes par des intérêts commerciaux et politiques.
Régulièrement, des entrepreneurs promeuvent des solutions technologiques destinées à détecter automatiquement des personnes susceptibles de présenter tel ou tel risque (terroristes…). Rappelons quelques faits statistiques…