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Mon travail photographique se construit par séries, mais certaines images circulent entre elles, créant des liens et des correspondances. La méta-série est ce cadre transversal qui permet de lire le travail dans sa continuité, où chaque image peut se réinventer selon le contexte et le regard porté sur elle.
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Habiter l’épaisseur du monde, ce n’est pas occuper un espace mais entrer en relation avec ce qui le compose. À partir d’un travail photographique mené en Ardèche, sur des terres habitées et travaillées avant moi, RÉSONANCES explore les strates du temps et les interactions du vivant — minérales, végétales, animales et humaines — pour interroger notre manière d’être au monde aujourd’hui.
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Il y a des œuvres qui ne naissent pas d’un projet, mais d’un état du monde.
Figures d’un Monde en Sursis est de celles-là : une traversée des signes faibles d’un monde qui se fissure à bas bruit. Avec la philosophe Claude Molzino — qui en a tiré un livre incisif — ce travail interroge ce que nos images disent malgré nous, et ce que notre époque refuse obstinément de voir.
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L’editing n’est pas un simple tri : c’est une pensée du visible. Dans un monde saturé d’images, il rétablit la durée, relie les fragments, et transforme la photographie en écriture critique du réel.
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À mesure que l’intelligence artificielle s’impose comme l’œil dominant de notre époque, une question fondamentale ressurgit : que signifie encore voir dans un monde où les machines prétendent regarder à notre place ? Derrière les prouesses techniques, c’est une bataille politique et existentielle qui se joue — celle de la liberté du regard.
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Le style, en photographie, peut devenir une prison dorée. À force de vouloir être reconnaissable, le photographe risque de se répéter, de répondre à l’attente des autres plutôt qu’à sa propre recherche. Entre reconnaissance et enfermement, où commence la perte du regard ?
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Jamais les images n’ont autant circulé, jamais les photographes n’ont été aussi précaires.
Autour d’eux prospère toute une économie : fabricants, galeries, plateformes, festivals.
Tous vivent de la photographie — sauf ceux qui la font.
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Aucune trame, aucun plan. Mes images naissent comme des apparitions, s’assemblent en constellations fragiles, reliées par des courants invisibles. Je ne cherche pas à expliquer mais à laisser résonner silences et écarts. Créer, c’est habiter cet archipel mouvant, où le sens affleure puis s’échappe, et où l’image parle avant les mots.
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Je viens de croiser Reiner Schürmann. Découverte tardive, mais coup de poing. Son récit Les Origines ouvre une faille : celle d’un Allemand hanté par un passé qu’il n’a pas choisi. Errance, exil, mémoire impossible à solder. Deux gestes qui se rejoignent : écrire et photographier pour dire que rien n’est effacé.
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Dans un monde saturé d’images, lire une photographie, c’est apprendre à voir autrement. Non pas comprendre, mais se laisser traverser. Une photographie n’est pas une fenêtre sur le réel : c’est une brèche. Une faille. Une présence fragile qui nous regarde autant que nous la regardons.