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Billet de blog 20 mars 2018

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20 mars 68: Karameh, une victoire de la Palestine

N° 24 de la série « 1968» qui en comportera plus de 68 sur l’année. La solidarité avec la Palestine prend un nouvel élan en 1968 marqué par la victoire de Karameh en mars sur l’armée d’occupation. Prochain article: « 22 mars 68: à Nanterre de jouer »

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20 mars 2018

Les militants de 1968 s’étaient aguerris dans la solidarité avec l’Algérie, Cuba et le Vietnam. La solidarité avec la Palestine prend un nouvel élan en 1968 marqué par la victoire de Karameh en mars sur l’armée d’occupation.

Histoire de la Palestine en 3 mn

Historique Palestine en 3 mn © Pays de Morlaix AFPS

En 1967, avec l’occupation de Jérusalem-Est, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, la solidarité se développe en France. Le 20 mars 68, a lieu la bataille de Karameh. On peut en lire sur le site EuroPalestine ce compte-rendu rapide:

« Ivres de leur victoire sur les armées de trois pays arabes en juin 1967, les dirigeants israéliens claironnent, en ces temps-là, que « les Palestiniens, cela n’existe pas », ou bien, comme le dit la future chef de gouvernement Golda Meïr, « les Palestiniens, c’est nous les Juifs ».

Mais le 21 mars 1968, le raid punitif qu’ils ont décidé contre le village de Karameh, en territoire jordanien, et qui se promet d’être une petite tuerie de routine, tourne mal : pour la première fois, l’invincible « Tsahal » se heurte à une résistance palestinienne organisée, forte de 250 combattants du Fath.

La majorité de ces jeunes Palestiniens, dont des dizaines d’étudiants rapatriés en urgence de l’étranger pour participer au combat, tomberont dans la bataille. Mais l’armée israélienne finit par se retirer, laissant sur le terrain des chars et des transports de troupes, et emportant les corps de 28 de ses soldats.

Les petites organisations palestiniennes, qui vivaient jusque là exclusivement dans l’orbite de différents gouvernements arabes, se sont paradoxalement émancipées grâce à la défaite militaire. Dès le mois de juin 1967, le Fath, qui sera pendant des décennies l’organisation dominante au sein de la résistance, informe ses militants que sa direction combat à l’intérieur des territoires occupés : ce qui est exact, Yasser Arafat se trouvant à Naplouse et Jérusalem, tandis qu’un autre dirigeant, Mahmoud Maswâda, essaie d’organiser la résistance à Hébron. Les quelques actions armées lancées depuis les territoires occupés sont dérisoires, et la répression israélienne, en Cisjordanie et plus encore dans la bande de Gaza, d’une redoutable efficacité. Au demeurant, les Israéliens se sont emparés, lors de la conquête des territoires, des fichiers de militants palestiniens établis par les polices égyptienne (pour la bande de Gaza) et jordanienne (Jérusalem et Cisjordanie), ce qui facilite la traque.

Il n’empêche. Pour la première fois depuis la grande révolte de 1936-1939, réprimée sauvagement par le colonisateur britannique, le mouvement national palestinien retrouve, aux lendemains de la guerre de 67, une forme organisée. »

En mai 68, pro-israéliens et des pro-palestiniens se retrouvent dans les manifestations. Au cours de l’occupation de la Sorbonne, par exemple, deux stands font leur apparition : l’un en faveur d’Israël, l’autre pour la Palestine, qui sont démontés pour éviter les tensions. A aussi lieu la première réunion publique sur le thème « Les réfugiés arabes de Palestine » organisée par l’Association de Solidarité Franco-Arabe (ASFA) qui vient d’être créée. La cause palestinienne est alors défendue par les organisations révolutionnaires.

Les années 1970 et 1980 connaissent la structuration de cet engagement: Association France Palestine (AFP), Association Médicale Franco-Palestinienne (AMFP) créée après la guerre de Kippour par des médecins proches de la LCR, du PSU ou du PCF, puis Association France Palestine Solidarité (AFPS) résultant de la fusion des deux. L’un de ces médecins, Marcel-Francis Kahn, est par ailleurs vice-président de l’Association Médicale Franco-Vietnamienne. De grands meetings ont lieu dans les années 80, après les massacres de Sabra et Chatila en1982 ou le déclenchement de la première Intifada en 1987. Les militants pro-palestiniens apportent aussi une aide concrète à la population palestinienne. L’OLP est de plus en plus perçue comme un embryon d’Etat. En 1989, est scellé le premier « jumelage » entre une ville française – Montataire dans l’Oise – et un camp de réfugiés palestiniens. Cette même année, Yasser Arafat est reçu à l’Elysée par François Mitterrand. 

Le processus de paix du début des années 1990 est majoritairement soutenu par les associations solidaires, qui suivent alors globalement les positions de la Délégation générale de la Palestine en France dirigée par Leïla Shahid dès avant  la signature des accords d’Oslo. En mars 1994, un meeting de soutien au peuple palestinien est organisé à Paris avec Leïla Shahid par des associations (AFP, AMFP, GUPS), des syndicats (CGT, SNES, etc.) et des partis politiques (PCF, Verts, etc). Mais cette même année les accords d’Oslo divisent les palestiniens et leurs soutiens. 

La deuxième Intifada éclate en septembre 2000 et se poursuit jusqu’en 2005, se soldant par la mort de 4 à 5000 Palestiniens et environ 1000 Israéliens. Puis les guerres se succèdent : à l’été 2006, de décembre 2008 à janvier 2009 et en novembre 2012. La construction du « mur » morcèle la Cisjordanie qui se retrouve coupée de la bande de Gaza. L’occupation coloniale progresse. Yasser Arafat meurt en 2004 et le Hamas arrive au pouvoir en 2006 à Gaza. De nouvelles structures naissent comme la Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (Capjpo), Génération Palestine, la Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien (CCIPPP) organisant des missions de solidarité dans les territoires palestiniens.

Depuis la victoire de Karameh, la solidarité avec le peuple palestinien, martyr du sionisme, a développé un savoir-faire militant, comme en témoigne le succès de la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) combattue par tous les secteurs pro-impérialistes.

Voir aussi sur les années 60 la brochure de la Ligue Communiste « Proche-Orient : de la résistance palestinienne à la révolution socialiste »

On pourra lire aussi ce dossier: La première victoire de Yasser Arafat... : Karameh, la bataille qui a scellé la fondation de l'OLP

Le même jour…

Attaque de l’American Express lors d'une manifestation du Comité Vietnam National (CVN)

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50 ans plus tard…

Mai 68: derrière les mythes, la réalité militante

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Articles déjà publiés dans la série « 1968 »

  1. 5 Janvier 68: Dubcek accède au pouvoir en Tchécoslovaquie
  2. "Eh bien non, nous n'allons pas enterrer Mai 68", par A. Krivine et A. Cyroulnik
  3. 26 Janvier 68: Caen prend les devants
  4. 27 janvier 68: les lycéens font collection de képis de policiers
  5. 29 Janvier 68: Fidel écarte les dirigeants pro-soviétiques
  6. 31 janvier 68: Vietnam, l’offensive d’un peuple héroïque
  7. Mai 2018 : sous les pavés la rage, par Jacques Chastaing
  8. Mai 68 vu des Suds
  9. 6 Février 68: grand Charles et grand cirque à Grenoble
  10. 14 février 68: combat pour le cinéma
  11. 17-18 Février 68: La jeunesse européenne avec le Vietnam
  12. Mai 68 n’a pas commencé en mai, ni en mars, ni au Quartier Latin, ni à Nanterre
  13. 24 Février 68: Plate-forme commune FGDS- PCF
  14. 26 février 68: L'aéroport c'est déjà non, et au Japon
  15. 1er Mars 68: bataille romaine de Valle Giulia
  16. Mai 68: des conséquences "positives" pour 79% des Français
  17. 1968: le père De Gaulle et la tante Yvonne, ça suffit !
  18.   8 mars 68 : révolte étudiante en Pologne
  19. 11 mars 68 : les affrontements de Redon donnent le ton
  20.   A retenir: le 23 Juin, colloque "Secousse et répliques de Mai-Juin 68"
  21. 15 Mars 68: Université en grève et répression sauvage en Tunisie
  22. 16 mars 68: My Lai, un Oradour sur Glane perpétré au Vietnam
  23. 18 Mars 68: début du Mai sénégalais 

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