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Dégoupillée au passage la grenade
pétales de pivoine rouge sang
éparpillés par la tornade
au jardin de mon gisant
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J’attends
qu’y a–t-il donc à attendre ?
les heures qui sonnent là-bas
à toutes les tours des villes d’Europe
effarouchant tour à tour les oiseaux du jour
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J’espérais, passagère apaisée de ce blanc navire
Cingler vers un cap aveuglant de lumière,
Or nous voguons entre deux eaux, je transpire
L’enfer s’éternise, la fièvre m’emportera la première.
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La plaine blonde sous les chaumes des moissons achevées attend le morne automne, les arbres dépouillés, leurs feuilles dispersées par la bourrasque, le départ des oiseaux migrateurs pour d’autres continents, l’annuelle débandade des hirondelles, un avenir plus que jamais incertain dans un monde rongé par la folie des hommes.
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Votre sombre regard
Ces deux coups de poignard
Blêmes mon visage et mon âme
Furtifs doigts de dame
Aux lourdes perles des cils
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Condamnés à n’être l’un pour l’autre que mystère, énigme indéchiffrable – destin dévolu à tous humains, tous amoureux, tous amants, depuis que le monde existe – il n’est que bienveillance, compréhension, tendresse, intelligence, pitié, transcendance née de l’amour et plus puissante, sacrifice parfois, échange de paroles, pardon, pour tenter de se rejoindre.
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Patagonie, Tasmanie, Terre de Feu
quelle patrie pour le poète sinon l’exil
quel pays pour nos amours sinon l’oubli
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Le Printemps, tout sourire, vagabondait sur les chemins de terre, foulant les mille fleurs des talus, gambadant sur les sentes des bois clairs, folâtrant dans les prairies hersées, traversant les champs emblavés, enjambant les ruisseaux babillards que chez nous on appelle « becs » depuis l’âge scandinave, pataugeant dans les gués, dansant dans le vent frais de mars en fredonnant ses ritournelles.
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Entre nous deux, tu as érigé un mur de silence, inexpugnable mur de l’Atlantique hérissé de dangers, cruel mur de Berlin des temps soviétiques aveuglant la liberté, monumentale muraille de Chine infranchissable par les hordes cavalières accourues du Nord pour réduire à merci l’Empire du Milieu en péril.
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Nous nagions dans la fraîcheur des vagues sous le soleil brûlant, moins rayonnant que nos visages éblouis par les pleins feux de l’été, la danse des eaux salées, l’amour fou et le bonheur partagé. Nous avions trente ans et la splendeur de chaque jour nous était promesse d’éternité.