En Chine, dans les moments de crise, les champs politique et artistique se relient et confondent l’un de l’autre, tandis que les luttes de positions et de conflits personnels se déguisaient sous la forme de débats autour d’idées artistiques. Dans le contexte particulier des années 1989 et 1990, le système de l’art officiel se réduisit à un théâtre de lutte pour le pouvoir, divisé entre deux camps.
Huang Yongping a ainsi dit dans les années 1980 : « En Chine, il n’existait pas (à cette époque) de collections d’art. Ceci est peut-être une bonne chose. Les artistes pouvaient traiter leurs tableaux de n’importe quelle manière sans regret, puisqu’ils ne les considéraient pas comme des marchandises ayant une valeur financière. »
Souvent considérée comme l’un des signes annonciateurs des événements 1989, l’exposition China/Avant-Garde fut reconnue au niveau international grâce aux deux coups de revolver de l’artiste Xiao Lu. En dépouillant l’aura de l’événement, on découvrira le fait que l’héroïsme de l'événement résidait plutôt dans un registre personnel du vécu féminin.
Huang Yongping expliqua ainsi : « Je pense qu’il vaudrait mieux abandonner l’idée d’originalité, notamment pour ceux (les artistes et critiques d’art chinois) qui font de l’art ou des théories de l’art. C’est une notion vide de sens, et elle épuiserait en revanche la richesse dans le geste de l’imitation...»
Une perspective héroïque ou nihiliste ? Ou une tentation de l’irrationalité ? Sinon une recherche de l’autonomie artistique ? Nous allons retracer les chemins de recherches de certains artistes - aujourd'hui bien connus sur la scène internationale - tels que Huang Yongping, Wang Guangyi et Zhang Xiaogang, etc.
Vers le milieu des années 1980, plusieurs mouvements artistiques regroupés sous le nom de « 85 New Wave », apparurent conjointement dans certaines provinces de la Chine, marquant le réveil d’une nouvelle génération d’artistes dans le système de l’art officiel. Il s’agissait de pratiques et de recherches en groupes destinées à explorer la possibilité d’une liberté artistique acquise petit à petit.
Les jeunes générations d’artistes chinois purent ainsi librement s’inspirer de courants d’art occidentaux pour se lancer dans de nouvelles expérimentations. Presque de manière boulimique, ces jeunes artistes firent référence aux avant-gardes occidentales pour intégrer toute sorte de « nouveaux éléments » dans leurs pratiques, afin de combler leur imagination et enrichir leur vision du monde.
Malgré leur aspiration partagée à l’émancipation, on constate le fait que les artistes indépendants et les artistes au sein du système de l’art officiel ne revendiquèrent pas les mêmes objectifs et ainsi, n’adoptèrent pas de logiques d’action similaires, ce qui créa un phénomène particulier : les artistes en quête de la liberté d’expression n’arrivaient pas à se soutenir mutuellement.
S’agit-il dans le fond d’une stratégie du maître Wu Guanzhong pour insuffler de nouvelle conception de l’art dans le champ artistique en Chine, ou plutôt une position individuelle pour apporter une vision particulière sur l’art abstrait ?
Ne ressemblant pas aux artistes indépendants, les artistes issus du système de l’art officiel semblaient ne pas souffrir autant d’obligations morales pour se justifier. Leurs rapports aux contraintes institutionnelles et idéologiques se révélèrent de manière plus discrète, comme dans un jeu du chat et de la souris.