Dans un rapport qu’il vient de publier, le Sénat rend publique une liste de recommandations visant à assurer une « protection effective » des enseignants. A la vérité, si les enseignants doivent être protégés de quelque chose c’est d’abord du Sénat et du climat d’hystérie entretenu autour de l’école.
Depuis sa création il y a six ans, en dépit de cafouillages logistiques et de la faible adhésion des jeunes, le SNU s'incruste peu à peu dans le cursus scolaire des élèves, obstinément mis en place par une Éducation nationale qui, au fil des ans, en est devenue le maître d’œuvre. Sans rencontrer beaucoup d'opposition...
A Paris, un proviseur menacé de mort après avoir demandé à trois élèves de retirer leur foulard : nouvel épisode d’une histoire sans fin qu’on peut faire remonter à 1989 (Creil), histoire dans laquelle l’Éducation nationale s'est lourdement fourvoyée.
Comment, dans un pays où il n’a jamais été la norme, l’uniforme scolaire peut-il faire l’objet d’une « expérimentation étendue » sans susciter l’expression massive d’une réelle incrédulité ? Ce sujet, né en dehors de l'école, est à l’origine d’une bulle médiatique complètement irrationnelle. Mais lorsque la déraison côtoie à ce point la politique, il doit bien y avoir une raison…
« Des sanctions fortes à la moindre entorse à notre pacte républicain… »… à l’école. On « ne négocie pas avec la République : on l’accepte, on la respecte en entier, sans la moindre exception » … à l’école. Devant les députés et devant les micros, Attal est intarissable sur le respect des règles, sur les punitions… à l’école. Car, pour le reste, c’est une autre histoire.
A défaut de saisir la nature réelle d’un phénomène dont on ne connaît pourtant ni l’origine exacte ni la conclusion, la dénonciation d’un coupable, la recherche d'un bouc émissaire virent au défoulement. De fait, en France, chacun cherche dans l’épidémie la confirmation de ses propres convictions. Un petit jeu aux conséquences hasardeuses.
Auditionné le 15 avril par le Sénat, le président du Conseil scientifique explique qu’à partir du 11 mai, 18 millions de personnes « à risque » devront rester enfermées pour une période indéterminée, peut-être jusqu’à Noël, peut-être jusqu’à 2021. Les sénateurs ne bronchent pas. Autant que la proposition folle du professeur en question, ce silence interpelle.
Et pendant l’épidémie, le SNU (service national universel) continue. Frayeur sanitaire, conséquences économiques et sociales non encore pleinement mesurables mais qu’on sait douloureuses : rien n’arrête la marche en avant d’un projet qui paraît chaque jour toujours plus surréaliste.
« C’est un complot », hurle Le Pen. « C’est un complot », reprend Mediapart. Une enquête bâclée, à base de prétendues « révélations » connues de tous depuis longtemps, reprenant tous les fantasmes des théories complotistes, prétend dénoncer « un scandale d’état ».
Face aux grandes épidémies du passé, dans un contexte souvent teinté de superstition et d’irrationnel, de panique vraie et de mauvaise foi, la recherche du coupable, du bouc émissaire était l’habitude. Il faut croire que les mauvais réflexes ont la vie dure, resurgissant aujourd’hui à l’occasion d’une épidémie, à cette différence près que les petits calculs n’y sont sans doute pas étrangers.