Comment nommer un régime qui détruit des maisons habitées et condamne à l’errance les populations pauvres ? Après une pause imposée par des recours en justice, les autorités ont repris leur politique de désolation. Rassérénées, elles ne dissimulent plus l’objectif des opérations : des saccages punitifs contre une délinquance présumée. Des gens mis à la rue par milliers. Des lieux de vie ravagés.
Après un baromètre de l’immigration illégale, un baromètre de l’habitat illégal, un baromètre du travail illégal, le préfet de Mayotte, décidément météorologue, fignole un baromètre pour mesurer la délinquance endémique. Le garde des Sceaux, lors d’une visite récente, promet les constructions d’une seconde prison et d’un centre fermé pour adolescents. La guerre aux pauvres ne connait pas de trêve.
Mayotte sait innover. Surtout en matière de déni de droit et d'exécution sommaire. Le juge rappelle-t-il que la loi Elan pose un préalable de relogement durable avant la destruction des habitations, le préfet se replie sur la procédure de la flagrance qu'il fait mine de croire libre de toute sauvegarde. Et les petits bras de la mairie et de la préfecture de se livrer au saccage et à la désolation.
Ce nouveau cycle de chroniques donne la parole à des familles condamnées sans procès à la ruine suite à la démolition de leur maison. Parole brute, sans retouche, de femmes et d’hommes brisés, qui puisent le petit filon de courage qui les tient debout dans la nécessité d’une survie sans cesse menacée. Aujourd’hui Zabibou qui a couru le risque d’accepter la proposition d’hébergement.
Malgré une condamnation infamante par le juge administratif, le préfet de Mayotte n’entend pas rectifier sa politique de démolition des quartiers pauvres. Abrogeant l’arrêté attaqué pour aussitôt en décréter un nouveau tout autant litigieux contre les mêmes habitants, il détruit sans retenue au nom de règlements propres à la France hexagonale que les autorités veulent imposer envers et contre tout.
Toute action politique à Mayotte s’articule autour de deux notions aujourd’hui fantasmées : la frontière qu’il faut refermer et l’image de soi qu’il faut restaurer. Ces illusions ont d’ores et déjà produit leur plein effet dévastateur sur l’ile. Les propagateurs de la peur et de la haine n’ont plus qu’à moissonner désarrois et ressentiments puis ramasser les dépouilles de notre humanité.
Tout n’a pas été dit au sujet de la politique de destruction des quartiers pauvres de Mayotte. Comment épuiser ce thème alors que le préfet lui-même s’est engagé à une destruction par mois ? Qui s’interroge sur le sort de ces gens ruinés par décision administrative n’en croira ni ses yeux ni ses oreilles. Car personne à ce jour, un mois après les événements, n’a réussi à se relever de ce désastre.
Le préfet de Mayotte enchaine les destructions de quartiers pauvres. Vendredi dernier 150 habitations furent à leur tour rayées de la carte. Ces opérations répétées seraient autorisées par une loi brandie comme un talisman par les décideurs. Pourtant il s'agit de décisions fondées sur le mensonge et de tyrannie envers des populations fragiles, politiques qui salissent l’honneur de la République.
Les démolitions des quartiers pauvres de Mayotte s’enchaînent les unes après les autres. Ce portofolio présentent les quelques familles encore sur place. Elles vivent au milieu des décombres des habitations démontées avant le grand chamboulement prévu le 5 novembre. Se montrant sans s’exposer, elles veulent ainsi exprimer l’effacement qu’elles subissent sans répit dans la société mahoraise.
Le préfet de Mayotte a signé récemment deux arrêtés de démolition des quartiers pauvres. La série funeste se poursuit sans heurt. A présent les habitants ne se font même plus d’illusion sur les promesses de relogement. Le pouvoir ignore-t-il que la lutte féroce engagée contre les pauvres atteindra tôt ou tard les catégories les plus élevées ? Espère-t-il l’explosion comme solution définitive ?