Yasser regarde Tahrir. Il est assis à l'une des six tables de ce café en plein air, érigé au coin de la place et de la rue Talaat Harb, à quelques mètres des barbelés. Le serveur prend la commande et disparaît dans le ventre d'un immeuble voisin, avant d'en ressortir, un plateau en équilibre sur la pulpe des doigts, et de distribuer les tasses de thé aux présents, assis dans des chaises en plastique à même la chaussée.
« La plupart des égyptiens vivent dans des zones rurales, la plupart sont pauvres. Comprennent-ils la constitution ? Vont-ils voter pour ? » On parle de voter pour ou contre un texte de soixante pages, là, alors on imagine à quel point c'est problématique que tant de gens en Egypte soient pauvres, se dit la dame de la BBC. Et qu'ils ne sachent pas lire.
234 articles sont approuvés en vingt-et-une heures. Il faut moins de temps à l'Assemblée Constituante égyptienne pour terminer un projet de constitution qu'à la planète Terre pour faire un tour sur elle-même. Un tiers de la centaine de membres de l'assemblée rend son chapeau avant que le passage en revue des articles n'ait commencé.
Ca commence par des affrontements nocturnes. Des gamins lancent des pierres rue Mohamed Mahmoud. Ils s'ennuient, ils sont désoeuvrés, ils viennent de quartiers pauvres : voilà ce qu'on dit d'eux. Pourtant, leur cause est juste : ils affrontent la police en mémoire de leurs amis morts la même semaine de novembre, un an plus tôt. Une soixantaine, en tout.
La rumeur enflait depuis une semaine déjà : le 17 septembre, une marche pour une révolution pacifique aurait lieu à Alger. Le débat avait commencé sur Facebook bien avant que qui que ce soit ne descende dans la rue, partisans du rassemblement contre partisans de l'ordre établi engagés dans une surenchère de commentaires.
L'histoire des interventions militaires occidentales dans les pays arabes a ceci d'alarmant qu'elle semble cyclique. Siècle après siècle, des hommes différents ont pénétré avec la même condescendance des pays au secours desquels ils avaient l'impression d'aller pour en réalité mieux y imprimer le joug colonial.
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