Témoigner de l'immanence de la transcendance et de la transcendance de l'immanence ("Arrête, où cours-tu donc, le ciel est en toi : et chercher Dieu ailleurs, c'est le manquer toujours." Angelus Silesius)…
On aimerait se rassurer, on a trouvé le coupable, nous pouvons cesser de nous inquiéter et nous rendormir : nous, nous sommes les justes, les bons, les saints, du bon côté de la barrière, ce n'est pas nous qui irons en enfer...
Dans l'évangile de Jean, il est courant d'opposer la figure de Pierre, le balourd impétueux, à Jean lui-même, le disciple idéal, que Jésus aimait ; mais ce serait oublier la troisième figure, Judas, dans le rôle de l'archétype du méchant...
On ne peut que s'interroger : comment Jésus a-t-il pu séduire aussi des personnes appartenant au gratin de la société de son époque, et non pas seulement tous les laissés pour compte, les pauvres, les malades, les méprisés...?
Les évangiles synoptiques tendent à faire croire que Jésus aurait été condamné pour des raisons religieuses, notamment parce qu'il aurait affirmé son identité avec Dieu ; une telle assertion est cependant formellement contredite par l'évangile de Jean.
Il s'agit sans doute ici du summum de la théologie de l'évangile de Jean, le passage où il tente de définir le plus précisément possible comment il comprend les rapports et liens de Jésus avec Dieu : identiques ? distincts ?
"Abraham a exulté de voir mon jour, et il l'a vu, et il s'est réjoui ! — Tu n'as pas encore cinquante ans et tu as vu Abraham ? — Avant qu'Abraham ne naisse, je suis". Alors ils ramassèrent des pierres pour les jeter sur lui...
On sent peut-être rarement à ce point dans l'ensemble des évangiles comme ces échanges entre Jésus et ses interlocuteurs sont vains, sans aucune chance d'aboutir : ils ne parlent pas de la même chose...
C'est moi ! — Mais qui, moi ? — Eh bien moi, celui que vous attendez tous, le messie, celui dont vous attendez qu'il vous dise quoi faire. Mais moi, ce que j'ai à vous dire, c'est un peu ça, mais pas du tout comme vous l'imaginez...
Être humain, simplement humain, c'est déjà aussi être divin, au moins potentiellement, car il est évident que tout ce que nous faisons ne fait pas automatiquement honneur à cette divinité, dont nous faisons pourtant partie ; jusqu'à quel point ?
Dans cette foule qui est censée écouter bouche-bée des discours que même les intellectuels les plus éminents ont bien du mal à comprendre, les avis sont forcément partagés. Comment alors échapper à l'alternative entre rejet ou approbation a priori ?