Confinée depuis trois semaines, Mayotte en reprend pour quinze jours. Après avoir déclaré dans le Canard enchaîné qu’« un confinement généralisé plongerait l'île dans le chaos », le préfet poursuit sans relâche la politique du pire en ruinant l'économie locale, pourchassant les étrangers et détruisant l’habitat pauvre.
Derrière les brutalités policières et le harcèlement des populations de Mayotte et de métropole, se dessinent les intentions affirmées de l’État d’effacer les traces de leur présence. Les méthodes requises pour y parvenir, mise à sac de campements, de domiciles, destructions de villages et déplacements forcées s’apparentent à des actes de guerre et relèvent de la barbarie.
Mayotte brûle-t-elle ? Sans doute lorsque médias et politiques soufflent sur les braises. Les flambées de violence observées depuis la mi-août, en fournissent à la presse et aux autorités une bonne occasion. Mais la délinquance dénoncée par les autorités et les élus depuis des décennies n'est-elle pas que l'écho lointain des libertés prises par l’État dans son rapport à la loi sur ce territoire ?
L’épisode de la pandémie a eu l’avantage de mettre en évidence que l’État français a bien séparé la population en deux catégories : celle qui participe à l’ordre social, économique et politique et qui mérite sa sollicitude ; et l’ensemble de tous les autres, les étrangers et les pauvres, dont il se demande comment il va pouvoir s’en débarrasser. A Mayotte il a d’ores et déjà trouvé la solution.
Mayotte n’a pas su confiner. Excessive pauvreté sinon misère noire, quartier d’habitations en tôles insupportables en journée, points d’eau souvent très éloignés. Mayotte ne sait pas déconfiner. Tout fonctionne à nouveau dans une situation de confusion totale. D'où l'on voit dans le témoignage accablant d'Angèle, l'unique point clair au programme : affamer la population pauvre.
Le confinement continue ! Et la vie a repris son cours ordinaire. Dans les quartiers pauvres entre village et campagne, Il y a longtemps que le virus est sorti de la tête. D’abord, il a fallu survivre à la perte des petits revenus. Mais d’un autre côté les populations déshéritées ont profité d’une trêve dans le harcèlement et les brutalités qu’elles subissent quotidiennement en temps normal.
Le moindre article de presse au sujet de Mayotte tourne un argumentaire autour de deux points statistiques : le taux de pauvreté et le taux d’étrangers. Ce discours spontané force les esprits à lier les deux questions. Il serait sain que les élites de la presse et du pouvoir cessent de reproduire des arguments à relent xénophobe dont tous les habitants de Mayotte font les frais.
Que se passe-t-il pour que les journaux nationaux de référence parmi les plus « progressistes » publient des articles sans se préoccuper de l’exactitude, et reprennent spontanément les argumentaires xénophobes des activistes les plus radicaux du territoire d’Outre-mer au risque de leur prêter une légitimité dangereuse ?
C’est atterrant. Dans une prétendue analyse des difficultés de l’île en ces temps de confinement difficile pour l’ensemble de la population, le journal du soir, journal de référence s’il en est, reprend à son tour et sans recul des éléments xénophobes. Assiste-t-on à la transformation d’un problème sanitaire en un problème sécuritaire dont les étrangers une fois de plus vont faire les frais ?
Confinement J 48. Témoignage d'une vendeuse dans une boulangerie mahoraise. Où l'on voit que les contrats de travail découlent d'arrangements entre parties dans lesquels le droit du travail intervient très peu. Ce rapport d’exploitation et de soumission structure l’ensemble des relations à Mayotte. Faut-il alors s’étonner que l’aide alimentaire n’ait pas atteint les populations étrangères ?