Reprise. Quelle belle langue que le portugais pour dire l’amour entre Antoine et Cléopâtre et la tristesse des héros, pressentant que leur amour court à sa perte, pressentant aussi qu’un jour quelqu’un racontera son histoire ? C’est le genre de pensée qui vous picore amoureusement le vague à l’âme lorsque l’on sort de « Antonio e Cleopatra », écrit et mis en scène par Tiago Rodrigues.
L’important, c’est de participer, disait le promoteur des Jeux olympiques modernes, lesquels devaient être autant sportifs que culturels. L’important, c’est le participatif, entend-on aujourd’hui dans la bouche de nouveaux promoteurs. Je participe, tu participes, il participatif. Le microcosme avignonnais est sur tous ces fronts.
D’un soir unique à l’autre, le Marquis de Sade et Michel Vinaver ont eu les honneurs d’Avignon. L’un avec deux de ses héroïnes, Justine et Juliette ; l’autre avec sa dernière pièce, « Bettencourt boulevard ».
C’est avec « Les Idiots » que le metteur en scène Kirill Serebrennikov avait ouvert sa première saison au Théâtre Gogol à Moscou à la rentrée 2012. Entretemps, la Crimée a été annexée par la Russie. Entretemps, Poutine et l’église orthodoxe russe ont exacerbé la fibre nationaliste et fortifié la verticalité du pouvoir. Entretemps, la vie de Kirill Serebrennikov n’a pas été de tout repos.
Quoi de commun entre « Le Vivier des noms » du Français Valère Novarina et « Ma femme m’a fait une scène et a effacé toutes mes photos de vacances » des Estoniens Tiit Ojasoo et Ene-Lis Semper, maîtres à penser du groupe N°99? Rien. Hormis le fait qu’ils partent l’un et l’autre sur des chapeaux de roues et perdent en route une part de leur énergie, tout les oppose.
« J’ai senti que tu m’appelais », dit la Dame en noir à l’Inconnu assis sur une planche en bois clair. C’est la seconde réplique d’« Andreas » d’après la première partie du « Chemin de Damas » d’August Strindberg traduite, adaptée et mise en scène par Jonathan Châtel dont on n’a pas oublié l’extraordinaire « Petit Eyolf ». C’est tout le spectacle qui nous appelle à nous asseoir à côté de lui.
Comment un type laid comme un pou, sans scrupules, comment cet homme prêt à tuer tous ceux qui encombrent sa route pour accéder au pouvoir, peut-il être séduisant, désirable ? C’est tout l’enjeu du « Richard III » de Shakespeare mis en scène par Thomas Ostermeier, traduit en allemand par Marius von Mayenburg et mené de main de maître par Lars Eidinger dans le rôle-titre.
Homme de théâtre à la ville comme à la scène, directeur du Festival d’Avignon autant que metteur en scène, Olivier Py a retraduit « Le Roi Lear » de Shakespeare pour le présenter dans le saint lieu : la Cour d’honneur du Palais des papes. Ce spectacle qu’il voulait fou n’est que bouffon.
Le Festival d’Avignon s’est ouvert samedi sur le coup de 15h à la Fabrica, par une rare splendeur : « Des arbres à abattre » de Thomas Bernhard magnifiquement et librement adapté par le Polonais Krystian Lupa.
Homme de dialogue s’il en fut, Jack Ralite nous avait déjà régalés, il y a longtemps déjà, en nous offrant la lecture de ses « Conservations avec Vilar et Vitez ». Dans « La Pensée, la Poésie et le Politique » (trois mots liés chez lui à jamais), il dialogue cette fois avec une journaliste, et aussi avec l’Histoire, en nous donnant à lire quelques lettres et discours marquants.