Le 22 janvier 2016, le Conseil d’Etat a pour la première fois suspendu une assignation administrative. C’est l’occasion de s’interroger sur l’efficacité de cette mesure restrictive de la liberté de circulation au regard de la menace terroriste.
Les juges administratif et judiciaire se disputeraient le soin de contrôler l’état d’urgence ? Pour quoi faire ? En l’état du texte de la loi du 3 avril 1955, ce contrôle juridictionnel ne peut être aussi protecteur des libertés qu’en période « normale », et pour les mesures les plus employées par l’exécutif – les perquisitions administratives –, il est de toutes manières inexistant.
La Commission nationale consultative des droits de l’homme a adopté le 15 janvier 2016 une déclaration critique à l’égard de la mise en œuvre de l’état d’urgence, de sa pérennisation et du projet constitutionnel tendant à déchoir certains terroristes nés français de leur nationalité française.
Le Conseil d’Etat a saisi le Conseil constitutionnel d’une QPC relative aux perquisitions administratives permises par la loi du 3 avril 1955. La disposition législative critiquée paraît au moins partiellement contraire à la Constitution ce qui, paradoxalement, pourrait légitimer la réforme en cours visant à constitutionnaliser l’état d’urgence.
Le Premier ministre a confirmé que la déchéance de nationalité insérée dans la Constitution concernera les seuls bi-nationaux nés français. On peut imaginer d’autres dispositions constitutionnelles « symboliques » et inutiles comme celle en cours d’examen par le Parlement.
Par Paul Cassia
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Seules 0,1% des perquisitions administratives menées dans le cadre de l’état d’urgence ont conduit à l’ouverture d’une enquête par la section antiterroriste du Parquet de Paris.
Le contrôle du juge administratif sur les assignations à résidence est nécessairement contraint par le texte même de la loi du 3 avril 1955 modifiée sur l’état d’urgence, qui fait prévaloir la sécurité sur la liberté.
Le projet de loi constitutionnelle « de protection de la Nation » prévoit l’exclusion de la nationalité française comme réponse symbolique au terrorisme. Il fragmente la citoyenneté alors que c’est la consolidation de l’appartenance à la Nation qu’il faudrait consacrer.
Ni l’extension de la déchéance de nationalité des bi-nationaux, ni la peine d’indignité nationale ne permettent de prévenir sérieusement la commission d’actions terroristes.
Pour la première fois dans l’histoire constitutionnelle française, c’est une révision dépourvue de toute effectivité pratique qui sera soumise à l’examen du Parlement à partir de février 2016. Pire encore, sa portée « hautement symbolique » est inverse à celle affichée par le Premier ministre.