Datée du 8 novembre une lettre est arrivée à la maison. Elle émanait de la préfecture et elle était accompagnée du décret du 28 octobre 1940 précisant « les conditions dans lesquelles les demandes de dérogation prévue à l’article deux de la loi du 16 août 1940 sur l’exercice de la médecine devront être adressés à Monsieur le Ministre, Secrétaire d’État à l’Intérieur. ».
Elle a été suivie d’une autre datée du 16 novembre 1940, un samedi. Elle émanait du Ministère de l’Intérieur à Vichy. Elle habilitait mon père à exercer sa profession jusqu’à ce que la décision de la commission chargée de statuer sur sa requête lui soit notifiée. C’était une lettre porteuse d’une bonne nouvelle !
MINISTERE de l'INTERIEUR
ÉTAT FRANÇAIS
Secrétariat Général à la
Famille et à la santé
5ème Bureau
VICHY, le 16 novembre 1940
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous accuser réception de votre demande d'autorisation d'exercer la médecine en application de l'article deux de la loi du 16 août 1940.
Le présent récépissé vous habilite, sous réserve des dispositions réglementaires concernant la création de cabinets médicaux dentaires ou d'officine pharmaceutique, à exercer votre profession jusqu'à ce que la décision de la commission chargée de statuer sur votre requête vous soit notifiée.
Veuillez agréer, Monsieur, l'assurance de ma considération distinguée.
Pour le Ministre :
Pour le secrétaire général,
signé : de Beaumont
Monsieur le Docteur Elman à Bourganeuf (Creuse)
Le répit a été de courte durée puisque le préfet de la Creuse faisait savoir à mon père par lettre datée du 11 décembre qu’il devait cesser l’exercice de sa profession « jusqu’à nouvel avis éventuel ».
Préfecture de la Creuse
Inspection Départementale
d’Hygiène
République Française
Liberté. – Egalité. – Fraternité.
Guéret, le 11 Décembre 1940
Le Préfet du département de la Creuse
à Monsieur le Docteur Elman à Bourganeuf,
J’ai l’honneur de vous informer que l’autorisation provisoire d’exercer la médecine qui vous avait été accordée par Monsieur le Ministre Secrétaire d’État à l’intérieur a été annulée par décision ministérielle du 5 décembre 1940.
Vous devez en conséquence, cesser l’exercice de votre profession à dater de la réception de la présente lettre et jusqu’à nouvel avis éventuel.
Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, l’assurance de mes sentiments les plus distingués.
Le préfet,
Jean Cabouat
Il y a quelque chose d’ironique dans l’en-tête du courrier envoyé par la préfecture : la devise « Liberté – Egalité – Fraternité » figure sous la mention République Française. S’agissait-il de manifester un quelconque esprit de Résistance ou bien, plus prosaïquement d’utiliser un papier à en-tête datant de la République ? Hélas trop de faits laissent penser qu’il s’agissait d’économiser le papier.
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